Forum d’Innovation en Recherche Clinique

2e édition

Date : 14 octobre 2025

 

Cette édition 2025 du FIRC de l’AFCRO[1] a mis en lumière les transformations majeures de la recherche clinique, marquées par l’intégration de l’IA[2], l’évolution des réglementations européennes, l’implication croissante des patients, et l’émergence de méthodes innovantes. Ci-après une synthèse des points clés de la journée et leurs impacts potentiels pour notre activité.

  1. L’impact des nouvelles réglementations européennes : AI Act, MDR[3] et EHDS[4]

L’AI Act impose des exigences strictes pour les systèmes d’IA à haut risque, notamment ceux intégrés dans les dispositifs médicaux ou utilisés en recherche clinique.

  • Classification par risque : Les outils d’IA en santé sont soumis à des obligations de transparence, de traçabilité et de supervision humaine (principe de « garantie humaine »).
  • Exclusion de la recherche scientifique : Les outils développés uniquement pour la recherche ne sont pas concernés, mais ceux utilisés en clinique ou pour des décisions thérapeutiques le sont.
  • Articulation avec le MDR : Les dispositifs médicaux impliquant de l’IA doivent être conformes aux deux règlements (MDR + AI Act), ce qui complexifie les processus de certification.

Le règlement MDR (Dispositifs Médicaux) et les essais cliniques :

  • Harmonisation Européenne : Un seul dossier pour les demandes multi-pays, mais des délais d’évaluation plus longs et des exigences de qualité accrues.
  • Base de données EUDAMED[5] : Portail unique pour les demandes d’autorisation, mais son déploiement est retardé et son utilisation reste complexe.
  • Enjeux : Nécessité de maîtriser les processus réglementaires et d’anticiper les retards liés aux organismes notifiés.

L’Espace Européen des Données de Santé (EHDS) :

  • Accès simplifié aux données : Un guichet unique (ORAD[6]) pour les demandes multi-pays, avec des délais encadrés.
  • Catalogue de métadonnées : Standardisation des descriptions des bases de données mais le financement et la mise à jour restent des défis.
  • Données de vie réelle : Opportunité pour les études observationnelles et les bras virtuels, mais nécessitent une interopérabilité accrue entre systèmes.
 

 

✅ Opportunités

Positionnement en tant qu’expert réglementaire : Accompagner les promoteurs dans la conformité AI Act + MDR, notamment pour les dispositifs médicaux innovants.

Développement de services liés à l’EHDS : Aider les clients à identifier et exploiter les bases de données européennes, en collaboration avec les ORAD.

Optimisation des essais cliniques : Utiliser les données de vie réelle pour compléter les essais traditionnels, réduisant ainsi les coûts et les délais.


⚠️
 Défis

Complexité réglementaire : Nécessité de former les équipes aux nouvelles exigences (AI Act, MDR, EHDS) et d’anticiper les retards liés aux organismes notifiés.

Interopérabilité des données : Investir dans des solutions techniques pour standardiser les données et faciliter leur exploitation.

Coûts supplémentaires : Les exigences accrues en matière de qualité des données et de traçabilité peuvent alourdir les budgets des essais.

 

  1. L’intégration de l’IA en recherche clinique : entre promesses et réalités

Applications concrètes de l’IA :

  • Automatisation des process : Segmentations d’images (radiothérapie), optimisation des doses, ou suivi des patients (ex. : Axomove pour la rééducation).
  • Modèles prédictifs : Identification des patients à risque de récidive (oncologie), mais peu déployés en routine faute de validation clinique ;
  • Essais adaptatifs : Ajustement des traitements en temps réel, mais coûteux et complexes à mettre en œuvre.

Freins à l’adoption :

  • Manque de confiance des cliniciens : Les outils d’IA sont perçus comme des aides à la décision, mais pas comme des solutions autonomes.
  • Données hétérogènes : Difficulté à standardiser les données entre centres, limitant la généralisation des modèles.
  • Financement : Les études prospectives pour valider l’IA sont onéreuses (800 000 € à 1 M€ pour 100-200 patients).

Réglementation et éthique :

  • RGPD et AI Act : Les données doivent être anonymisées ou pseudonymisées, avec des garanties de sécurité strictes.
  • Transparence : Les patients doivent être informés de l’utilisation de l’IA, sans toutefois les surcharger d’informations techniques.
Impacts

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 Opportunités

Partenariats avec les industriels : Accompagner les start-ups et pharma dans la validation clinique de leurs outils d’IA (ex. : études pragmatiques, RWE[7]).

Formation et conseil : Aider les promoteurs à naviguer entre AI Act et MDR, et à standardiser leurs données pour l’IA.


⚠️
 Défis

Investissement en R&D[8] : Nécessité de développer des compétences internes en IA et en gestion des données.

Collaboration avec les cliniciens : Convaincre les investigateurs de l’utilité de l’IA, via des preuves cliniques solides.

Gestion des risques : Anticiper les biais algorithmiques et les problèmes de reproductibilité des modèles.

 

  1. L’innovation méthodologique : essais décentralisés et participation des patients

Essais décentralisés :

  • Réduction des contraintes logistiques : Moins de déplacements pour les patients (ex. : 4 000 km évités dans un essai en oncologie).
  • Implication des professionnels de proximité : Infirmiers libéraux, médecins traitants, etc.
  • Flexibilité : Combinaison de visites à domicile et de suivi en centre expert.

Implication des participants :

  • Communautés engagées : Ex. : Seintinelles (43 000 membres) ou Fédération Française des Diabétiques, qui accélèrent les recrutements et co-construisent les protocoles.
  • Bénéfices : Meilleure adéquation des études aux besoins réels, et amélioration de l’observance.
  • Défis : Représentativité des données (biais socio-économiques) et formation des patients-experts.

Consentement et éthique :

  • Une information claire : (Alain Vidal, CPP[9] de Brest) à 80 % des patients ne comprennent pas les informations des essais. Nécessité de simplifier les supports.
  • Vérification de la compréhension : Questionnaires ou entretiens pour s’assurer que le patient a bien saisi les enjeux.
Impacts

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 Opportunités

Développement d’essais hybrides : Combiner visites traditionnelles et décentralisées pour élargir l’accès aux essais.

Partenariats avec les associations de patients : Collaborer avec Seintinelles. pour booster les recrutements et co-construire les protocoles.

Solutions logistiques : Proposer des services de coordination pour les visites à domicile (ex. : gestion des infirmiers libéraux).


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 Défis

Adaptation des processus : Réviser les SOP[10] pour intégrer les essais décentralisés.

Gestion des données : Garantir la qualité et la sécurité des données recueillies à distance.

Acceptabilité par les promoteurs : Convaincre les industriels de l’intérêt des méthodes innovantes (RWE, essais adaptatifs).

  1. Conclusion : La recherche clinique de demain

La recherche clinique est en pleine mutation, avec des opportunités majeures. Les priorités sont claires :

  • Elever son niveau d’expertise sur les nouvelles réglementations (AI Act, MDR, EHDS).
  • Innover dans les méthodologies (essais décentralisés, IA, RWE).
  • Placer le patient au cœur de la recherche, en collaboration avec les associations et les cliniciens.

 

🌍 « L’Europe est le territoire de la prudence, mais aussi de l’excellence »

 

[1] AFCRO : Association Française des CRO ; [2] IA : Intelligence Artificielle ; [3] MDR : Medical Device Regulation ; [4] EHDS : European Health Data Space ; [5] EUDAMED : European Database on Medical Devices ; [6] ORAD : Organisme responsable de l’accès aux données ; [7] RWE : Real-World Evidence ; [8] R&D : Recherche et Développement ; [9] CPP : Comité de protection des personnes ; [10] SOP : Procédure Opérationnelle Standard.

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